vendredi 5 mai 2023

Faut-il craindre le potentiel dictatorial de la Vème République?

 

La réforme de la retraite passée, on entend partout parler de « crise démocratique ». On peut douter de la pertinence de ce diagnostic pour plusieurs raisons : les procédures ont été respectées, on ne peut pas reprocher à un pouvoir régulièrement élu d’agir contre l’opinion majoritaire, au nom d’un programme annoncé, et de ce qu’il considère comme un intérêt supérieur, enfin, comment s’étonner qu’un gouvernement néolibéral applique des mesures à même de « rassurer » les marchés financiers créanciers, sacrifiant au passage les catégories les moins favorisées. Ce constat désabusé ne délégitime aucunement les mouvements de résistance, les manifestations, les grèves, la réponse de « ceux qui ne sont rien » à un gouvernement si peu préoccupé de justice sociale.

La France reste ce qu’elle était déjà avant la crise : une démocratie perfectible, classée seulement 23ème sur 165 pays, selon l’indice de démocratie fondé sur 60 critères, publié tous les ans par le groupe britannique The economist. Cependant une « dérive autoritaire » est indéniable, rendue possible par notre régime de « monarchie élective » qui, tous les cinq ans, donne des pouvoirs exorbitants à un seul homme, réduisant ainsi l’entièreté de la vie politique à l’élection présidentielle. Dans un contexte de déliquescence politique et sociale, la question cruciale est dorénavant la potentialité dictatoriale de la Vème République.

D’après les indices internationaux, la démocratie est en net recul partout dans le monde, et en France les enquêtes révèlent un niveau record de défiance envers les élections et « les élites politiques ». Ce contexte, inédit depuis le début de la Vème république, constitue le terreau idéal pour l’arrivée d’une figure incarnant « le rétablissement de l’ordre », thème éternel de l’arrivée des dictateurs par la voie des urnes. Si dans la foulée cette figure obtenait une majorité au parlement, quels seraient les garde-fous contre une dérive dictatoriale ?

-       Une police surarmée, majoritairement d’extrême droite ?

-       Un Parlement réduit au rôle de chambre d’enregistrement ?

-       Un conseil constitutionnel dont la pusillanimité est dorénavant manifeste ?

-       Des médias mainstream aux mains d’« oligarques » à la française, et un service public de l’audiovisuel privé du seul moyen de son indépendance, la redevance ?

Qui pourrait garantir que ce scénario catastrophe est impossible ? Nous regretterions amèrement de ne pas avoir agi avant, pour promouvoir une réforme constitutionnelle visant à désamorcer le potentiel dictatorial de notre république. Nous avons quatre ans...

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