lundi 3 janvier 2022

Quel programme post-covid ?


            Un programme électoral est constitué de réponses à certaines questions jugées fondamentales. Pour la clarté des débats, celles-ci doivent être explicites. Ainsi, alors que la campagne présidentielle débute, des questions de fond découlent de la situation de désintégration sociale, de perte de repères et d’effritement de la confiance, provoquée par la pandémie de covid-19. J’en distingue trois qui me semblent essentielles.

Comment refonder le rôle de l’Etat ?

Une grande partie des citoyens ne voient plus dans l’Etat une institution démocratique vouée à la défense des biens communs face aux intérêts privés. Comment regagner cette confiance ? Selon moi, en revenant aux fondamentaux : les grandes missions de services publics, notamment l’hôpital et l’école. Il s’agit aussi de réaffirmer la primauté de la délibération démocratique, contradictoire et pluraliste, face à une lente et puissante dérive autoritaire et arbitraire, qui divise les citoyens en chapelles irréconciliables, transforme l’Etat en un monstre froid, et produit un rejet croissant de la démocratie elle-même.

Comment valoriser l’utilité sociale des métiers ?

La pandémie a accru le sentiment d’injustice face à une échelle des rémunérations inversement proportionnelles à l’utilité sociale des métiers. L’utilité économique n’est pas négligeable mais sans régulation elle produit des inégalités de rémunérations qui menacent gravement le lien social en exacerbant le sentiment d’injustice face à un écart des rétributions totalement déconnecté de l’idée-même d’utilité sociale. Est-ce une société souhaitable, celle où ceux qui s’occupent des personnes sont bien moins reconnus et valorisés que ceux qui s’occupent des choses ? Qui osera mettre cette question à l’ordre du jour ?

Comment rétablir la confiance dans les institutions d’établissement des faits ?

Enfin, on assite à un ébranlement grave des deux institutions d’établissement des faits essentielles au débat démocratique : les grands médias d’information généraliste et la communauté scientifique. La première a été confisquée par quelques grands groupes privés, et on ne voit plus clairement ce qui distingue les médias de service public, dépendant des grands annonceurs. La seconde se trouve décrédibilisée par deux facteurs : le travail de sape de semeurs de doute professionnels, facilité par un niveau de culture scientifique dramatiquement faible. La science ne s’exprime qu’à la première personne du pluriel : « Nous savons que… », « Nous ignorons si… », alors comment permettre à ce « Nous » de trouver une expression publique forte face aux premières personnes du singulier des experts médiatiques stipendiés ou aux chantres de l’alterscience ?

Ces trois questions discutables, incomplètes, méritent sans doute d’être mieux formulées. Quels programmes les prennent en compte ?