samedi 15 février 2020

Les résaux sociaux menacent-ils la démocratie ?



Deux affaires récentes ont fait penser que les réseaux sociaux mettaient gravement en péril la démocratie.
Acte 1 : Une jeune lycéenne provoque des internautes musulmans qui réagissent tels des chiens de Pavlov. Rien de nouveau, mais une ministre de la justice évoque une « atteinte à  la liberté de conscience ». 
Acte 2 : Un jeune marquis macronien apprend à ses dépends une variante de la loi de Gabor pour quiconque vise une position de pouvoir : tout ce qui est publiable sera publié.  Mais les bonnes âmes évoquent une « atteinte grave à la démocratie ». 
Il me semble que ce sont au contraire les réactions à ces deux cas qui sont des symptômes extrêmement inquiétants. Pour l’affaire Mila, le droit au blasphème est non négociable. Le respect est dû aux personnes, non aux idées abstraites, aux idéologies ou aux croyances. Ainsi c’est la réaction de la garde des sceaux qui relève d’une atteinte à la liberté d’expression, pas la vulgarité crasse de Mila ou la bêtise de ceux qui sont tombés dans le piège qu’elle leur a tendu, et qui vont se retrouver en correctionnelle pour appel au meurtre.
Dans le cas Griveaux, deux éléments me semblent évidents : il se met en scène sur une sex tape alors qu’il brigue les plus hautes fonctions de l’Etat, on peut en conclure qu’il est stupide et totalement ignorant du fonctionnement des réseaux sociaux. Par ailleurs, la sex tape fait exploser l’image propre et lisse de bon mari et bon père de famille que Griveaux vend à des électeurs pour lesquels il n’a donc aucun respect. Mettre ses paroles et ses principes en accord avec sa vie, tel est le contrat implicite des hommes et femmes publiques qui endossent des positions de pouvoir.
Ces deux affaires, et surtout l’unanimité contre les excès de la liberté d’expression qui les accompagne, arrivent à point nommé : une loi « contre les propos haineux sur internet » - dite « loi Avia » - est en passe d’être adoptée qui donnera à l’Etat les moyens de court-circuiter la justice pour mettre fin sur les réseaux sociaux à tout propos « haineux ». On peut imaginer ce que le flou du vocable « haineux » autorisera en matière de censure. Ce ne sont pas tant les réseaux sociaux qui menacent la démocratie, mais plutôt l’Etat néo libéral qui menace la liberté d’expression.