Cette question fait immédiatement penser à la guerre
de Poutine contre l’Ukraine. Nous – Français et Européens - sommes pris dans
cette guerre, même si celle-ci se déroule exclusivement sur un autre territoire
que le nôtre, sans soldats français impliqués. Mais il y a une autre guerre à
laquelle nous participons directement.
« On
devrait être en économie de guerre climatique ». C’est l’appel de
François Ruffin pour orienter d’urgence notre économie vers une transition écologique :
sortir des énergies fossiles, investir massivement dans les alternatives en
matière de transport, d’isolation des bâtiments, de sortie de l’agro-industrie
intensive, de ré-industrialisation… Cet appel risque de masquer ce fait :
nous sommes déjà depuis longtemps engagés dans une guerre économique globale contre
les espèces vivantes, les sols, les sous-sols, les forêts, les nappes
phréatiques, les lacs, les mers, les océans, bref la« nature » réduite
à un stock de ressources organiques et minérales à transformer en profits « quoi
qu’il en coûte ». Nous sommes donc déjà dans une économie de guerre, ne
faudrait-il pas promouvoir une économie de sortie de la guerre ?
La métaphore de la guerre est selon moi pleine de
sens : il y a des perdants et des gagnants, il y a des morts, humains et
non-humains, il y a des bellicistes, des résistants, et une énorme masse de
suivistes. Les bellicistes sont les technocrates serviteurs des marchés
financiers et les cadres dirigeants des lobbies industriels, les résistants
sont les militants et les activistes présentés comme « éco-terroristes »,
les suivistes constituent la masse des individus enrôlés malgré eux dans une
guerre jadis invisible, dorénavant d’une aveuglante évidence.
La métaphore de la guerre est mobilisatrice, elle
oblige à se situer. Pas d’espace neutre, pas de Suisse, la guerre est partout
et nulle part, nous y sommes engagés que nous le voulions ou pas. Si nous ne
faisons pas partie des résistants, nous pouvons au moins minimiser notre participation
à l’effort de guerre, soutenu par nos jobs, notre
consommation, nos modes de vie, nos voyages. Il n’y a pas de guerre sans armée,
et pas d’armée sans engagés.