vendredi 16 juin 2023

Dans quelle(s) guerre(s) sommes-nous engagés ?

 

Cette question fait immédiatement penser à la guerre de Poutine contre l’Ukraine. Nous – Français et Européens - sommes pris dans cette guerre, même si celle-ci se déroule exclusivement sur un autre territoire que le nôtre, sans soldats français impliqués. Mais il y a une autre guerre à laquelle nous participons directement.

« On devrait être en économie de guerre climatique ». C’est l’appel de François Ruffin pour orienter d’urgence notre économie vers une transition écologique : sortir des énergies fossiles, investir massivement dans les alternatives en matière de transport, d’isolation des bâtiments, de sortie de l’agro-industrie intensive, de ré-industrialisation… Cet appel risque de masquer ce fait : nous sommes déjà depuis longtemps engagés dans une guerre économique globale contre les espèces vivantes, les sols, les sous-sols, les forêts, les nappes phréatiques, les lacs, les mers, les océans, bref la« nature » réduite à un stock de ressources organiques et minérales à transformer en profits « quoi qu’il en coûte ». Nous sommes donc déjà dans une économie de guerre, ne faudrait-il pas promouvoir une économie de sortie de la guerre ?

La métaphore de la guerre est selon moi pleine de sens : il y a des perdants et des gagnants, il y a des morts, humains et non-humains, il y a des bellicistes, des résistants, et une énorme masse de suivistes. Les bellicistes sont les technocrates serviteurs des marchés financiers et les cadres dirigeants des lobbies industriels, les résistants sont les militants et les activistes présentés comme « éco-terroristes », les suivistes constituent la masse des individus enrôlés malgré eux dans une guerre jadis invisible, dorénavant d’une aveuglante évidence.

La métaphore de la guerre est mobilisatrice, elle oblige à se situer. Pas d’espace neutre, pas de Suisse, la guerre est partout et nulle part, nous y sommes engagés que nous le voulions ou pas. Si nous ne faisons pas partie des résistants, nous pouvons au moins minimiser notre participation à l’effort de guerre, soutenu par nos jobs, notre consommation, nos modes de vie, nos voyages. Il n’y a pas de guerre sans armée, et pas d’armée sans engagés.