mardi 3 août 2021

Faut-il discuter l'inidscutable ?

 

Toute discussion s’appuie sur une base commune, un fond indiscutable qui délimite le champ de la discussion possible. Par ailleurs l’idéal démocratique implique une éthique de la discussion, où il ne s’agit pas forcément de convaincre l’autre, mais surtout de se comprendre mutuellement, se mettre d’accord sur le désaccord.

Or cette éthique est mise à mal dans cette période de crise où les discussions génèrent malaise, incompréhension, suspicion, exaspération, les interlocuteurs renvoyés à des oppositions radicales – résistant / collabo ; liberté / servitude ; démocratie / tyrannie ; altruisme / égoïsme ;... A ce stade, on peut décider de ne plus parler du sujet qui fâche, mais le clivage demeure, lourd d’amertume. Pour maintenir ouvert l’espace de la discussion possible, je propose une éthique de la discussion par l’explicitation deux principes préalables et un questionnement mutuel visant à trouver le point d’origine du désaccord, à partir duquel la discussion tournera à vide.

-       Principe de faillibilité : nous ne sommes pas des experts, mais des citoyens qui tentons de nous faire une opinion par un effort limité d’accès limité à des sources limitées.

-       Principe de charité : nous sommes des êtres rationnels, ainsi chacun à de « bonnes raisons » de penser ce qu’il pense, dont certaines échappent d’ailleurs au locuteur lui-même.

Ces deux principes étant admis au début de la discussion, je propose un questionnement mutuel visant à entériner les points d’accord, jusqu’à la limite au-delà de laquelle la discussion deviendra inutile voire contre-productive, en vertu du principe de persévérance : quand quelqu’un s’est forgé une opinion ferme sur un sujet, quel qu’il soit, il ne cherchera qu’à consolider sa position « quoi qu’il en coûte ». Exemple pour le sujet qui nous préoccupe tous en ce moment :

-       Y a-t-il une crise sanitaire planétaire grave ? Si désaccord : stop.

-       Dans cette situation est-il normal que les Etats mettent en place une politique sanitaire au prix d’une restriction de certaines libertés individuelles ? Si désaccord : stop.

-       Cette politique doit-elle être éclairée par l’état des connaissances établies par la communauté des experts ? Si désaccord : stop.

-       Les institutions publiques organisant le consensus des experts sont-elles honnêtes ou corrompues ? Si désaccord : stop.

Ayons la sagesse d’arrêter la discussion quand nous arrivons au roc dur du désaccord irréductible, n’essayons pas de discuter l’indiscutable.