Un biais psychologique très puissant tend
à nous faire croire que les malheurs qui nous frappent sont imputables à une
intention malveillante. C’est ce biais qui sous-tend le mythe d’un complot
judéo-maçonnique à l’origine de tous les malheurs du monde. Ainsi, en pandémie,
la question « C’est la faute à qui ? » n’est pas triviale, ceux
qui la posent laissent l’inconscient collectif œuvrer dans le silence des
cerveaux disponibles. Contre ce travail souterrain, il faut des réponses
explicites. Le pass sanitaire, c’est la faute à qui ?
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Pour les anti-pass, c’est la faute à une « dictature sanitaire »
née de la collusion entre l’Etat et les grandes firmes pharmaceutiques. Mais
cette réponse néglige volontairement deux paramètres essentiels : la
gravité de la pandémie et l’efficacité des vaccins. Ainsi le mouvement anti
pass apparaît pour l’essentiel comme la résultante de trois courants :
covidosceptique, antivax et complotiste.
On
peut proposer d’autres réponses concernant les causes de la défiance vaccinale,
qui est a motivé l’instauration du pass sanitaire. C’est la faute à qui ?
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Au travail de sape des semeurs de doute contre les institutions de savoir
et d’établissement des faits, essentielles au fonctionnement de la
démocratie : la science établie et les médias main stream.
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Aux promoteurs d’une alterscience, qui discréditent systématiquement tout
ce soutient l’idée que les vaccins sont, depuis Pasteur, le moyen le plus
efficace pour lutter contre une épidémie virale causant des millions de morts
dans le monde.
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A la défiance croissante et réciproque entre l’Etat et les citoyens, le
premier vu comme une oligarchie servant des intérêts obscurs, les seconds comme
des individus égoïstes irrationnels qu’il vaut mieux contraindre que
convaincre.
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A ceux et celles qui, opposés à toute discipline collective, confondent la
liberté civile et la licence individuelle, la première bornée par l’idée de bien
commun, la seconde par le fantasme de toute puissance : je fais ce que je
veux, comme je veux, quand je veux.
La
confiance dans les Lumières et la science, c’est la faute à Voltaire ; la
confiance dans une Volonté générale pour le bien commun, c’est la faute à
Rousseau.