Il fallait d’abord pleurer les victimes du carnage perpétré par le Hamas, il fallait ensuite réfléchir à ses causes. Des experts, historiens, politologues, journalistes, ont produit des analyses documentées et pertinentes. Mais une question reste encore sans réponse : d’où vient cette rage qu’aucune raison stratégique ne suffit à expliquer ? Au-delà des islamistes fanatiques, qu’est-ce qui pousse des hommes à ne pas se contenter de tuer, mais à massacrer, violer, mutiler, torturer, probablement depuis la nuit des temps, particulièrement à l’occasion de guerres comme en Allemagne, au Kosovo, au Rwanda, en Syrie, en Ukraine ou en Israël ?
A cette question, un
grand historien, spécialiste des deux guerres mondiales, a répondu :
« parce qu’ils le peuvent ». Cette idée simple a une grande
portée anthropologique. Elle signifie qu’en chacun de nous il existe un fond de
rage, un agent dormant attendant qu’une autorité, une religion, une idéologie,
une guerre, une situation l’autorise à passer à l’acte.
Cette idée éclaire
aussi d’une lumière particulière la multiplication des actes antisémites depuis
le pogrom du Hamas et les bombardements de Gaza qui y ont répondu. Soudain les
digues ont sauté, rendant soudain parfaitement légitime, au nom de la cause
palestinienne, d’exprimer ouvertement son antisémitisme par des mots, des coups
de poing ou de couteau,…ils le peuvent !
La
tragédie israélo-palestinienne n’a pas exacerbé l’islamophobie, elle a exacerbé
l’antisémitisme ; elle ne l’a pas généré, elle en a juste révélé
l’ampleur, jusque-là contenue - en France en tout cas - par des normes morales,
des lois, une stigmatisation sociale. Constat amer et habituel : l’antisémitisme
est la chose du monde la mieux partagée, il existe dans tous les pays, même
ceux où il n’y a plus de juifs - en Pologne, en Roumanie -, même ceux où il n’y
en a pratiquement jamais eu, comme au Japon. Pourquoi 15 millions de personnes
dispersées sur toute la Terre obsèdent un milliard d’individus, dans au moins
120 pays, (d’après une étude internationale citée sur France Culture - L’esprit public, 5 nov. 2023). Pourquoi
y a-t-il « un peuple élu par la haine universelle »*?
(Léon Pinsker Avertissement d’un juif russe à ses frères, 2006). Peut-être
pour être l’objet toujours disponible de ce fond intime de rage sur lequel défouler
les frustrations, les humiliations, le désespoir, le malheur. Les
juifs servent à ça.