L’arrivée
massive de la société civile sur la scène politique est une des belles
surprises de la Macronie naissante. Ses laudateurs soulignent les bienfaits qu’il
est permis d’en attendre pour la démocratie : la représentativité et l’intérêt
général. Qu’en est-il ?
- Le Parlement
représenterait enfin vraiment le peuple français, et non une classe de
politiciens professionnels encartés. A y regarder de plus près, la réalité est
moins enchantée, et révèle plutôt la continuité de la confiscation des institutions
par la catégorie socioprofessionnelle « supérieure », celle des plus
diplômés et des mieux dotés en patrimoine : les ingénieurs, les avocats,
les chefs d’entreprise. Ainsi l’arrivée au pouvoir de la « société civile »
n’est pas tant le signe d’une rupture que
d’une homogénéité sociale et idéologique avec la classe politique au pouvoir
depuis plus de 50 ans. C’est donc par une ruse de l’histoire que celui qui
représente le mieux cette continuité est aussi celui qui incarne de façon
éclatante l’idée de renouveau.
- Cette
société civile aurait au moins une meilleure perception de l’intérêt général
que la vieille classe des politiciens obnubilés par leur carrière et leur réélection.
Ainsi par un curieux retournement, ceux qui ont fait profession de s’occuper du
bien commun seraient moins dignes de confiance que ceux qui ont jusqu’à présent
travaillé pour leur propre compte. Au fond la société civile qui arrive au
pouvoir c’est un peu comme si les plus privilégiés étaient chargés d’abolir les
privilèges. Pour ne prendre qu’un exemple : ceux qui vont définir les
orientations de l’Education nationale sont les parents des enfants qui bénéficient
le mieux de l’école telle qu’elle est actuellement, alors même que les enquêtes
s’accumulent qui sacrent la France championne des inégalités scolaires.
Les esprits chagrins dont je fais partie voient donc dans
la société civile que le marketing politique nous vend si bien, un leurre qui
masque une continuité idéologique et politique, et qui s’appuie sur deux mythes :
la représentativité démocratique et l’intérêt général.
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