lundi 6 mars 2023

Quelle forêt cache l'arbre de la retraire à 64 ans ?

Comment les terriens du futur jugeront-ils l’énergie phénoménale que nous dépensons collectivement pour deux années supplémentaires de « vie active », au moment où la co-habitabilité de la planète – formule d’Yves Citton - est gravement menacée ? C’est un peu comme si on discutait du confort des sièges dans une voiture fonçant vers un mur. Quel paradoxe : on nous somme de travailler deux ans de plus et nous investir ainsi davantage dans l’entreprise productiviste écocidaire, au moment où il faudrait absolument ralentir et bifurquer ! Or voici le comble de ce paradoxe, l’arbre des 64 ans masque une forêt : la richesse sémantique de l’idée-même de retraite qui fournit des outils précieux pour penser la bifurcation :

-       Faire retraite, c’est se retirer de l’agitation du monde pour se recueillir. En l’occurrence, il s’agirait de refuser de participer davantage à l’ubris consumériste extractiviste en désertant les jobs toxiques - bullshit jobs et jobs destructeurs - comme nous y invitent les diplômés de l’Agro-Paris-Tech.

-       Battre en retraite, c’est abandonner une position forte, privilégiée, pour sauver l’essentiel : donner un sens humanisant à son travail, au prix d’une moindre rémunération.

-       Retraiter, c’est réorienter l’intelligence et la créativité humaine vers d’autres modèles de la vie bonne que celui de la folie compétitive exacerbée par la propagande publicitaire.

Le paradoxe se double d’un point aveugle : la réforme présentée comme nécessaire suppose implicitement une croissance économique continue. En effet, les retraites à venir s’entendent « toutes choses égales par ailleurs », alors-même que la catastrophe écologique impactera gravement la sphère économique. Ainsi le réalisme comptable s’opère au prix d’un aveuglement totalement irrationnel.

Idée : travailler deux ans de plus collectivement, non pour financer les retraites, mais pour amortir la bifurcation : financer l’isolation de toutes les passoires thermiques, aider les pays du sud à éviter l’aberration écocidaire du modèle occidental. « Soyons réalistes, demandons l’impossible ! » 

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