dimanche 10 mai 2020

Et après ?



Quels sont les chantiers qui nous attendent pour après ? Je pense qu’il faut que nous soyons le plus nombreux possible à penser le plus possible à l’après, collectivement et individuellement. Je vois pour ma part cinq chantiers : Revitaliser notre démocratie, Démocratiser la science, Valoriser ce qui a de la valeur, Relativiser notre relativisme, Soigner notre viralité.
-       Revitaliser notre démocratie atteinte par une pathologie politique : la dictature virocratique. Le traitement de fond devra faire l’objet d’un grand débat national, mais il faut d’abord exiger que nos dirigeants rendent des comptes sur la façon dont ils ont géré la crise. Dans d’autres démocraties, on trouve normal et salutaire que l’exécutif vienne rendre des comptes devant le parlement, et soit soumis à son jugement, pas chez nous. Dans notre monarchie républicaine, le président-roi ne rend jamais de compte, tout au plus lors de la prochaine échéance électorale, mais les projets pour le nouveau quinquennat occupent bien plus les esprits que les comptes à rendre sur le précédent. Le parlement n’est qu’une chambre d’enregistrement de décisions déjà prises, et l’opposition ne joue qu’un rôle mineur de figuration. Il faudra un procès pour que le compte soit fait des erreurs, mensonges, dissimulations, qui ont servi de justification à la dictature sanitaire. Premier chantier : régénérer notre démocratie.
-       Valoriser ce qui a de la valeur. Nous avons réalisé collectivement à quel point certains métiers sont essentiels, soit parce qu’ils ont été en première ligne – soignants, aides-soignants, auxiliaires de vie, métiers de l’alimentation et de l’information… – soit parce qu’ils nous ont cruellement manqué – les métiers de la culture, de l’enseignement…. D’autres sont apparus soudain sous un autre jour : neutres ou superflus. Or l’échelle des rémunérations des fonctions est souvent inversement proportionnelle à leur utilité sociale. Deuxième chantier : remettre à plat les échelles de rémunération, métier par métier.
-       Démocratiser la science. Profitant de la faiblesse de la culture scientifique, la dictature virocratique a instrumentalisé la science à travers un « Conseil scientifique », voix officielle univoque qui a justifié le principe calamiteux du TINA – There Is No Alternative. Or il y a toujours eu différentes options pour faire face à l’épidémie. La science n’est pas le lieu des certitudes inébranlables, mais celui du doute systématique, de la critique par les pairs. Une « étude » - mot fétiche des médias - ne dit jamais la Vérité, elle ne fait qu’apporter une pierre à un édifice en cours de construction, et la qualité de ses résultats doit toujours être située sur une échelle de valeur qui va de « très faible » à « très fort ». Tout citoyen doit apprendre à estimer cette valeur, son indice de confiance. Troisième chantier : extraire la science des cercles d’initiés pour la placer au centre de l’espace public, au cœur de notre culture commune.
-       Relativiser notre relativisme. En démocratie, l’information est une denrée essentielle. Or nous réalisons mieux en ces temps troublés qu’elle est aussi un marché soumis aux lois de la communication, de la notoriété, du spectacle, de la rentabilité. Face aux semeurs de doute professionnels qui ont un intérêt à décrédibiliser toute autre pensée que la leur, qui sont passés maîtres dans l’art de mélanger le vrai et le faux, il nous faut apprendre à passer l’information au filtre de la raison, à définir ce qu’est une source fiable, à distinguer un fait établi - comment et par qui ? – et l’interprétation du même fait – comment et par qui ?. Cette période d’inflation informationnelle doit aussi servir à prendre conscience de notre tendance spontanée à sélectionner les informations qui disent ce que nous « savons » déjà, qui confirment nos préjugés. Quatrième chantier : apprendre à filtrer l’information et à opérer l’esprit critique d’abord contre nous-mêmes.
-       Prendre conscience de la nature virale de l’être humain. Un virus est un agent infectieux qui a besoin d’un hôte vivant pour se reproduire. L’analogie est saisissante : l’homme est un virus qui ne peut prospérer qu’en parasitant la biosphère, qui à son tour se défend de façon vaccinale en nous injectant des Contre-virus – des Co-Vi. Le paradoxe du virus pathogène c’est qu’il tue l’hôte nécessaire à sa survie. Ce paradoxe se dissout si on réalise que le virus n’est rien en tant qu’individu, sa seule fonction est de coloniser de nouveaux hôtes pour que son espèce se perpétue. Nous n’avons pas d’autre biosphère à coloniser, alors sa fin sera aussi la nôtre. Dernier chantier : soigner notre propre nature virale.


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