Les gens écrivent de plus en plus, mais
lisent de moins en moins (source : baromètre
2025 du CNL). Pour comprendre ce paradoxe, il faut distinguer 1) l'écriture*
réflexive impliquant relecture puis correction, et l’écriture° spontanée sur
les réseaux sociaux, qui n'est qu'un oral secondaire, une orature ; 2) la lecture* profonde impliquant une
concentration continue et exclusive sur un texte, et la lecture° superficielle.
Ainsi le paradoxe se dissout : les gens lisent° et écrivent° de plus en
plus,... mais lisent* et écrivent* de moins en moins.
La cause en est, c’est bien documenté,
l'omniprésence chronophage des écrans, mais le problème est plus profond :
cette omniprésence développe une habitude d'attention diffuse et sautillante,
au détriment de l'attention focalisée continue nécessaire pour la lecture*
profonde et l'écriture* réflexive. La pratique de lecture* faiblit mais résiste,
promue par l’école, les parents, et l’industrie du livre. Celle-ci a compris le
profit qu'elle peut tirer des IA, ainsi le nombre d'ouvrages écrits - ou coécrits
- par Chatgpt augmente de façon exponentielle (source : actualitte.com). Par contre la pratique
d'écriture*
se réduit de plus en plus aux cercles universitaires, littéraires ou
journalistiques.
L'enjeu n'est pas trivial : alors que le
monde bascule sous nos yeux, il y a une régression sans précédent du politique,
une dévalorisation massive des valeurs démocratiques au profit d'une pure
logique de la puissance qui déteste la pensée, et donc la lecture* et l’écriture*.
Cette situation inédite rend nécessaire une mobilisation de l’intelligence politique
collective dont la base fondamentale est la discussion. Je prétends que l'écriture*
en est une condition nécessaire, car elle seule permet l'expression de ses
pensées de la façon la plus juste possible, elle seule permet à ceux qui
entrent dans la discussion d'être bien compris, contredits, nuancés, enrichis,...
Ca tombe bien : il n’y a jamais eu
sur la terre autant de lecteurs-scripteurs ! Triste constat : les
gens sont intimidés, paralysés par l'écriture*, et même on dirait qu’ils
détestent écrire*. Sommes-nous destinés à laisser la connerie et le
bullshit nous submerger au moment où le monde bascule ?
Ne laissons pas le capitalisme cognitif,
ses armées d’algorithmes et d’IA, nous exproprier de la lecture* et de l'écriture*.
Soyons le plus nombreux possible à penser le plus possible, donc à écrire*
le plus possible !
Aux plumes citoyens !