vendredi 4 février 2022

Peut-on croître et décroître en même temps ?

 

 

Dans le catalogue des promesses électorales, deux semblent unanimement partagées : l’augmentation du pouvoir d’achat, la diminution de l’empreinte carbone. Il y aurait là une note d’espoir… si elles ne s’avéraient pas mutuellement incompatibles.

Cette incompatibilité ressort d’un raisonnement simple, peut-être simpliste : 1) On ne peut pas augmenter le pouvoir d’achat sans augmenter la production de richesses. 2) On ne peut pas augmenter la production de richesses sans augmenter la consommation d’énergie. 3) On ne peut pas augmenter la consommation d’énergie tout en diminuant notre empreinte carbone. Il y aurait ainsi une contradiction au cœur de la seule chose qui fasse à peu près consensus parmi les candidat(e)s, quelles que soient leurs divergences idéologiques. A ignorer cette aporie, le risque est grand de subir, dans les années qui viennent, une aggravation brutale de la triple crise sociale, économique et écologique. Pourquoi un tel aveuglement devant ce dilemme : sacrifier le pouvoir d’achat sur l’autel de l’écologie, ou sacrifier l’écologie au nom du pouvoir d’achat.

La question « Consentez-vous à réduire votre pouvoir d’achat au nom de l’écologie ? » est indécente si l’on considère la situation de précarité et de paupérisation d’une part de plus en plus grande de la population. La seconde option –accepter la surconsommation comme un mal nécessaire - a un avantage électoral décisif car le court terme sera toujours plus payant électoralement. Mais comment continuer à ignorer l’impact de la production matérielle sur le dérèglement climatique ?

Esquisse de réponse : Il ne sert à rien de dénoncer les méfaits du capitalisme néo-libéral qui aliène les individus en dévastant notre planète, si l’on ne remet pas en question le régime libidinal qui en est la condition nécessaire : le désir d’achat. Aussi la question pertinente serait : « Comment réduire notre désir d’achat ? ». Cette question demeure indécente pour une majorité de citoyens qui essaient juste de survivre. Ainsi un programme politique qui prendrait cette question au sérieux devrait à mon sens proposer au minimum deux mesures urgentes :

-       Une limitation drastique de la publicité qui alimente en continu le régime libidinal néolibéral, et faisant de la surconsommation une condition nécessaire de la « vie bonne ».

-       Une limitation de l’inégalité économique qui atteint des niveaux inconnus depuis le XIXème siècle, et nourrit un ressentiment lourd de menaces.

            On peut augmenter le pouvoir d’achat de ceux qui peinent à joindre les deux bouts, à condition de taxer fortement les revenus au-delà d’un seuil à déterminer, tout en agissant concrètement pour diminuer le désir d’achat qui est au cœur de la surconsommation énergétique. Je ne vois pas d’autre solution pour sortir du dilemme. Et vous ?


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